Le repos: un art à (ré)apprendre

Dormir… et se réveiller fatigué

On nous répète souvent que les trois piliers d’une vie saine sont : l’alimentation, l’exercice physique et le sommeil.
Et c’est vrai : le sommeil est essentiel pour permettre à notre corps et à notre cerveau de se régénérer, éliminer les déchets et grandir (notamment chez les enfants, mais aussi pour développer nos connexions neuronales et intégrer les expériences de la journée).

Un manque de sommeil — ou un sommeil de mauvaise qualité — fragilise notre immunité, augmente le brouillard mental et le risque de blessures, et ne nous permet plus de bien réguler notre humer et nos émotions.

Mais dans notre monde hyperconnecté et surstimulant, dormir ne suffit plus à vraiment se sentir reposé.

De quels types de repos avons-nous besoin ?

Selon la Dre Saundra Dalton-Smith, autrice du livre Sacred Rest, il existe sept grands types de repos :

  1. Physique

  2. Mental

  3. Sensoriel

  4. Émotionnel

  5. Social

  6. Créatif

  7. Spirituel

Regardons de plus près les cinq premiers types de repos :

  • Repos physique : il s’agit bien sûr du sommeil, mais aussi de siestes, d’exercices doux (yoga, marche lente) ou de techniques de relaxation musculaire

  • Repos mental : notre cerveau a besoin de pauses face à la surcharge d’informations, aux prises de décision et à la résolution de problèmes.
    ➤ La pleine conscience, le jardinage ou le dessin peuvent l’aider à errer sans pression.

  • Repos sensoriel : nos sens sont constamment sollicités — surtout chez les enfants.

    • Une déconnexion des écrans, un moment de calme ou une sortie dans la nature sont des respirations nécessaires.

  • Repos émotionnel : s’accorder un temps à soi, loin des environnements émotionnellement épuisants, pour accueillir et reconnaître ses émotions.

  • Repos social : selon que l’on soit introverti ou extraverti, la présence des autres peut être énergisante… ou au contraire, drainante.

    • L’essentiel est de s’éloigner des relations qui épuisent et de cultiver des liens positifs et bienveillants.

Les deux derniers types — créatif et spirituel — nourrissent notre capacité à rêver, à donner du sens, à créer et à relier.

Comment aider les enfants à mieux se reposer ?

Les enfants, eux aussi, ont besoin de différents types de repos. Voici quelques repères simples :

  • Mettre en place une routine du coucher régulière (découvre mon article sur un exemple de routine du soir).

  • Laisser-leur du temps libre pour jouer et sortir, idéalement en nature.

  • Respecter leurs besoins de pauses sensorielles ou de siestes, même si cela bouscule le planning.

  • Écouter-les — avec les oreilles, mais aussi avec le cœur : leurs besoins évoluent sans cesse.

  • Montrer l’exemple : parle de tes propres besoins de repos.

    • Par exemple : « Maman a besoin d’un petit moment pour elle. Je t’aime très fort, mais mon verre d’attention est un peu vide et je dois le remplir. »

Comment aider les adolescents à se reposer ?

A l’adolescence, les rythmes biologiques changent, ce n’est pas de la paresse

Les ados vivent une tempête invisible : changements hormonaux, quête d’identité, hyperstimulation numérique, pression scolaire et sociale. Le corps et le cerveau changent. La sécrétion de mélatonine — l’hormone du sommeil — se décale naturellement, retardant l’endormissement d’une à deux heures.
Les adolescents ne deviennent pas paresseux : ils sont simplement “programmés” pour s’endormir plus tard, tout en ayant encore besoin de 8 à 10 heures de sommeil. Ce rythme biologique entre souvent en conflit avec les horaires scolaires matinaux.

N.b.: Les écrans accentuent ce décalage, sans en être la cause principale.

Les effets du manque de sommeil chez les ados

En France, près de 40 % des jeunes de 15 ans dorment moins que les recommandations. Ce déficit chronique n’est pas sans conséquences : moins de sommeil = moins bonnes performances et régulation émotionnelle.

  • Impacts émotionnels : augmentation de l’anxiété, de la dépression, des comportements impulsifs et du risque suicidaire.

  • Impacts cognitifs : baisse des performances scolaires, de la concentration, et augmentation du risque d’accidents.

  • Ces effets sont observés même pour des privations modérées.

Comment aider les ados à être mieux reposer ?

Recommandations du CSEN (Conseil scientifique de l’Éducation nationale)

Le CSEN (2) propose de reconnaître le sommeil comme un besoin fondamental, au même titre que l’alimentation ou l’activité physique, et notamment de:

  • Adapter les horaires scolaires (autant que possible) pour mieux respecter leurs rythmes biologiques,

  • Intégrer l’éducation au sommeil dans les programmes et la formation des enseignants,

  • Sensibiliser les adolescents à leurs rythmes biologiques, plutôt que de se focaliser uniquement sur la réduction du temps d’écran.

En pratique, c’est aussi un apprentissage du repos

Aider un ado à se reposer, c’est :

  • accepter ses rythmes (certains ont besoin de dormir tard le week-end),

  • limiter les écrans avant le coucher,

  • valoriser les temps “sans performance” : écouter de la musique, créer, flâner, rêver, ne rien faire,

  • offrir un espace de parole où il se sent libre de ne pas aller bien.

  • Et surtout, montrer l’exemple : se reposer soi-même, pour lui donner la permission de le faire.

Le repos n’est pas un luxe ni un signe de faiblesse — c’est une force intérieure qui aide à grandir, se réguler et s’épanouir.

Le repos au travail : un enjeu collectif

Pourquoi les entreprises devraient-elles valoriser le repos ?

Un employé bien reposé est plus concentré, créatif et calme. Il collabore mieux, prend du recul et voit plus loin. Le repos est pour les entreprises un levier de performance durable

Comment favoriser le repos au travail ?

Voici quelques pistes simples :

  • Laisser de vrais temps de pause entre les réunions et une vraie coupure déjeuner.

  • Mettre à disposition une salle de repos ou d’éclairage tamisé pour une sieste ou une pause sensorielle.

  • Encourager les sorties en extérieur (une simple marche de 10 minutes dans un parc a déjà un impact) ou la pratique sportive sur la pause de midi.

  • Instaurer des limites claires : horaires de mails, signaux “ne pas déranger”, moments de concentration respectés.

Et vous, quelles initiatives aimeriez-vous voir dans votre entreprise pour favoriser un vrai repos ?

Le repos, un pilier oublié de la performance sportive

Dans le sport, on célèbre souvent l’effort, la discipline, la persévérance. Pourtant, le repos est une phase d’entraînement à part entière — indispensable à la progression, à la performance et à la prévention des blessures.


Durant les périodes de repos, le corps ne “s’arrête” pas : il répare les tissus musculaires, reconstitue les réserves énergétiques et renforce le système immunitaire. C’est aussi pendant ces moments que s’opèrent les adaptations physiologiques liées à l’entraînement (croissance musculaire, amélioration de la coordination neuromusculaire, régulation hormonale).

Même de courtes siestes ou des techniques de relaxation active peuvent améliorer la vigilance, la prise de décision et la précision gestuelle chez les athlètes. (3) Centre d’Études et de Recherche en Médecine du Sport (CERMS)

L’absence de récupération adéquate — physique comme psychique — peut entraîner un syndrome de surentraînement, caractérisé par une fatigue chronique, une baisse des performances, des troubles du sommeil et une vulnérabilité accrue aux blessures. (4) Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance (INSEP)

En conclusion, se reposer n’est pas s’arrêter mais revenir à soi pour mieux avancer

Le repos est un art qu’il nous faut (ré)apprendre sans jugement. Il nous rend plus vivants, plus attentifs, plus humains.

Le repos est un acte culotté de résistance douce dans un monde qui va trop vite.


📚 Source :
(1) Sacred Rest, Dr. Saundra Dalton-Smith

(2) Note CSEN IDEE 2025 01 (CSEN (Conseil scientifique de l’Éducation nationale))

(3) Recovery for Performance in Sport, Human Kinetics (2013, CERMS – Hausswirth C. & Mujika I.).

(4) Récupération et performance sportive : stratégies et individualisation, dossier scientifique (2023, INSEP)

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